Vaccination des enfants : les éclairages du Dr Célestin Traoré
En prélude à la célébration du cinquantenaire du Programme élargi de vaccination, le conseiller chargé de la vaccination au bureau régional de l’Unicef en Afrique de l’Ouest et du Centre, s’est livré à la presse internationale mercredi 17 avril 2024, via Zoom.
Le Réseau des médias africains pour la promotion de la santé et l’environnement (Remapsen) dont la mission est d’inciter les journalistes du continent noir, à s’engager dans le traitement des sujets liés à la santé et à l’environnement, a tenu son habituel webinaire mensuel, le 17 avril 2024. Son invité, le Dr Célestin Traoré, conseiller chargé de la vaccination au bureau régional du Fonds des nations unies pour l’enfance (Unicef) en Afrique de l’Ouest et du Centre, a dressé le bilan de la vaccination pédiatrique non sans relever les insuffisances et problèmes à résoudre dans les parties occidentales et centrales de l’Afrique.
« C’est une opportunité pour les acteurs de la santé, de célébrer les succès en matière de vaccination, de relever les défis que nous devons continuer à faire face et surtout d’engager les différents décideurs, les différentes communautés », a introduit le Dr Célestin Traoré. Il fait ainsi allusion à la semaine mondiale de la vaccination célébrée chaque année, du 24 au 30 avril. Cela coïncide cette année avec le cinquantenaire du Programme élargi de vaccination.
Qu’est-ce qu’un vaccin ?
Pendant sa présentation, l’épidémiologiste du Royal Tropical Institute d’Amterdam et de Paris, prévient qu’ « un vaccin est une substance d’origine microbienne, qui est introduite dans l’organisme humain, pour développer ses capacités de défense. Ce qui fait que l’individu est protégé à chaque fois qu’il sera confronté à ce microbe, qui a été injecté dans son corps ».
La vaccination empêche la maladie de se propager dans la communauté et par conséquent, réduit significativement le nombre de malades. « Les vaccins sont des interventions qui coûtaient moins chères » rappelle-t-il. L’Unicef, agence fournissant les vaccins à prêt de la moitié des enfants dans le monde, ne ménage d’ailleurs aucun effort pour réduire les dépenses lors de l’acquisition de cette substance.
Ses deux autres dimensions à savoir, l’efficacité (le fait que la personne vaccinée est protégée et ne fait pas la maladie) et l’impact qu’il a sur la santé de la population, ainsi que sur le développement économique et social, justifient l’importance du vaccin. « Quand on vaccin un enfant et qu’il est protégé, ça lui permet de continuer son processus scolaire en toute quiétude, explique le Dr Célestin Traoré. Ce qui constitue l’économie pour le ménage. On parle dans ce cas, d’efficacité du vaccin » .
50 ans du PEV : Succès, pour la vaccination des enfants en Afrique de l’Ouest et du Centre
En Afrique de l’Ouest et du Centre, la couverture vaccinale est stagnante depuis les trois dernières années, soit 69%. Cette couverture sur le plan global africain étant évaluée à 74%. « C’est-à-dire que notre région a une performance beaucoup plus faible qu’ailleurs. Tendance baissière par rapport au taux de 71% qu’on avait en 2019. Cela est dû à l’impact de la Covid sur le système de santé », souligne le médecin. Même s’il faut reconnaître que l’expert se veut optimiste.
Selon le spécialiste en santé publique, la vaccination a induit un changement notable dans l’architecture de la santé. Dans les deux régions au cœur de l’échange, « la vaccination a permis de réduire les décès liés à la rougeole de 25% entre 2000 et 2014. Grâce à elle, nous sommes actuellement en phase d’éradication de la polio », car les progrès établis depuis 2020, montrent que l’Afrique de l’Ouest et du Centre sont sur la bonne voie.
Ces succès, à mettre à l’actif du Programme élargi de vaccination, vieux de 50 ans, parce qu’existant depuis 1974, entraine automatiquement un impact économique considérable. « La vaccination va permettre, sur le plan économique, d’empêcher 5 millions de personnes d’entrer en pauvreté jusqu’en 2030 », renseigne l’invité.
Défis et perspectives
Le monde étant imparfait, le chemin a bien sûr été également émaillé d’obstacles et d’embuches. Les couvertures optimales n’ont pas encore été atteintes dans ces parties de l’Afrique. « Nous avons fait de gros investissements, notamment pour ce qui concerne la chaîne de froid, le renforcement des capacités, mais il y a encore des efforts à faire, précisément pour que les stratégies optimales de vaccination soient mises en place ; puisque nous nous rendons compte que les vaccins n’arrivent toujours pas où se trouvent les populations ».
En plus des difficultés d’accès des vaccins dans les zones éloignées, mal desservies ou affectées par les conflits, existe des problèmes liés à sa disponibilité. « Vous savez que dans le mécanisme d’achat, les vaccins sont co-payés par les donateurs et les gouvernements. Quand l’une des parties est défaillante, la rupture crée l’indisponibilité du vaccin », révèle le conférencier de circonstance.
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Pour atteindre donc l’objectif fixé (90% de couverture vaccinale), il faut d’abord renforcer le système de santé, à en croire le spécialiste. Ensuite, impliquer toutes les couches et catégories sociales dans la vaccination, en mobilisant les leaders, autorités et autres. Et enfin, il faut sérieusement travailler sur la demande.
Arnaud Kevin Ngano