Au Cameroun, comment booster la participation politique des jeunes handicapés ?
Pour accroitre la visibilité des jeunes handicapés sur l’étendue du territoire national, le ministère camerounais de la Communication et l’Organisation non gouvernementale Sightsavers ont regroupé les cybers journalistes, blogueurs et personnes handicapées jeudi 26 septembre 2024 à Mbalmayo dans la région du centre-Cameroun.
« Quand tu es une personne ayant un handicap, tu es considéré par plusieurs camerounais, comme une personne à part. Et quand on te côtoie, découvre de quoi tu es capable, tu deviens comme un objet de curiosité, qu’on qualifie de sorcier ; pourtant il n’en est rien ! » Dans l’une des salles de conférence de l’hôtel départemental de Mbalmayo, bien aménagée pour recevoir des séminaristes, Olivier Tombi A Sanam, président du comité des jeunes handicapés de la plateforme nationale des organisations de promotion de l’inclusion des personnes handicapées, se réjouit de la tenue de l’atelier de formation des associations des jeunes et des médias sociaux, sur la participation politique des jeunes handicapés. L’homme au chapeau large bord, lunettes noirs, costume noir et cravate bleue foncée, est un jeune handicapé visuel : « En tant que jeune handicapé, j’ai rencontré trop de difficultés. En fait, on se demande toujours ce que peut faire un aveugle, qu’est-ce qu’il peut nous apporter ? »
Comme Olivier, doctorant en science politique, plusieurs autres jeunes handicapés assistent ce jeudi 26 septembre 2024, à l’atelier de formation des réseaux des jeunes et des médias sociaux sur les droits et la participation des jeunes handicapés à la vie politique et publique. A travers cette initiative, il est question pour le ministère de la Communication en partenariat avec l’ONG Sightsavers, de susciter l’engagement des cyber-journalistes et bloggeurs, à produire des contenus sensibles aux droits des jeunes handicapés.
Les efforts fournis
Après les mots de bienvenu du délégué départemental de la Communication dans le Nyong-et-So’o, Aristide Manga Assiga, et la présentation de la trentaine de participants, 30 minutes sont d’abord consacré à une communication sur les activités de la plateforme nationale des organisations de promotion de l’inclusion des personnes handicapées. Selon Boniface Mvondo, chargé de programme au sein de cette organisation de la société civile existant depuis 2011, la plateforme mobilise « tous les acteurs à travers le territoire national, qui œuvre pour le bien-être des personnes handicapés afin d’emmener les décideurs, pour une meilleure prise en compte de l’approche handicap dans tous les secteurs d’activité ».
Dans le cadre du projet « A better world », elle « a accompagné des personnes handicapées dans l’établissement des pièces officielles, soit 500 cartes nationales d’identité et 406 actes de naissance », apprend-on de la communication de Boniface. De même, 45.000 personnes handicapées sont inscrites sur les listes électorales actuellement, grâce à la plateforme nationale des organisations de promotion de l’inclusion des personnes handicapées. Seulement, la médiatisation de cette présence demeure faible et inquiétante.
Dispositions légales et gouvernementales
La contribution de ces acteurs du développement qu’on cachait par le passé par honte, mépris ou considération culturelle, mérite d’être connue et vue par tous, à défaut d’être acclamée haut et fort. C’est justement pourquoi, les organisateurs de l’atelier de Mbalmayo ont mobilisé les fabricants de l’information pour les nouveaux médias afin qu’ils « adaptent leurs contenus pour que les personnes handicapées puissent non seulement être informés de ce qui se passe, mais aussi être au courant de leurs droits et avoir une meilleure visibilité », renseigne Kisito Ngankak, directeur du développement des médias privés et de la publicité.
Le Cameroun étant un pays de droits, des lois et textes encadrant la promotion et la protection des personnes handicapées existent. Le ministère des Affaires sociales (Minas) via Martin Paul Désiré Ayo, sous-directeur de la protection sociale des personnes handicapées et des personnes âgées au Minas, a pris la peine de présenter ce cadre juridique aux bénéficiaires de la rencontre. Il s’agit par exemple de la constitution (dès son préambule), de la loi du 13 avril 2010 portant protection et promotion des personnes handicapées, la Convention des nations unies relatives aux droits des personnes handicapées, des règles des nations unies pour l’égalisation des chances des personnes handicapées, le traité de Marrakech, la charte africaine des droits de l’homme et des peuples relative aux droits des personnes handicapées, les Objectifs de développement durable des nations unies (ODD).
Valoriser la personne handicapée dans les productions médiatiques
Pour Sandra Rimoh Dossou, programme Officer social inclusion à Sightsavers, il y a en fait un petit réglage à faire. « L’idée c’est de valoriser la personne dans ses potentialités, parce qu’à la fin, le handicap doit être considéré comme l’expression de la diversité humaine, et les personnes handicapées doivent être considérées comme des personnes à part entière qui sont des acteurs du développement ayant leur rôle à jouer », martèle-t-elle.
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A la fin de l’atelier, le délégué départemental de la communication dans le Nyong-et-So’o, Aristide Manga Assiga, émet le vœu de voir « les participants fructifier ce qu’ils ont reçu, en vue de favoriser l’inclusion sociale et politique des jeunes handicapées ».
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Arnaud Kevin Ngano de retour de Mbalmayo.