Développement : le rôle des ingénieurs de l’Afrique centrale en question
Jeudi 26 septembre 2024, s’est tenu un webinaire régional en mode hybride. La cinquantaine de participants à cette rencontre, a examiné les possibilités de résolution du manque criard de capacités d’ingénierie en Afrique centrale, pourtant indispensable au développement.
En Afrique centrale, les ingénieurs sollicités pour des travaux, sont très souvent importés. Les raisons ? « L’inexistence de formations continues », déclare Régine Flore Madjouda, ingénieur de génie rural sortie de l’Ecole national supérieure des travaux publics de Yaoundé. A cela s’ajoute bien sûr : la production insuffisante des établissements de formation, la mauvaise qualité de l’enseignement et le manque d’expériences pratique des diplômés.
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C’est pour répondre à ce problème, que la Fédération des organisations de l’ingénierie en Afrique centrale, en partenariat avec l’Organisation des nations unies pour la science, la culture et l’éducation (Unesco), ont tenu un webinaire régional le 26 septembre 2024. Mettant en exergue le rôle de l’ingénieur dans le développement de l’Afrique centrale, cette assise rentre dans le cadre de la célébration de la semaine africaine de l’ingénierie prévu chaque année sur le continent noir. Objectifs : faire mieux connaitre la profession, inciter les étudiants à poursuivre des études d’ingénieurs en intégrant des modules pratiques dans l’enseignement des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques.
Formations et stages professionnels
Lors de ce webinaire riche en présentations et discussions, l’inefficacité des partenariats entre les institutions de formation et les entreprises a été soulevé. « Ce que nous avons constaté au niveau de nos différents ordres professionnels, c’est que les stages professionnels organisés par les écoles ressemblent tout simplement à une formalité », déplore Philippe Mbesse Balomiki, directeur général du génie rural et président de l’ordre des ingénieurs du génie rural au Cameroun, insistant sur le manque de suivi des ingénieurs stagiaires, que ce soit par leur institut ou par l’entreprise.
Ainsi, ces deux parties gagneraient à associer les regroupements corporatistes aux différents processus pédagogiques et professionnels des ingénieurs, pense Kizito Ngoa, président de l’Ordre national des ingénieurs du génie civil. Selon lui, ce séminaire a été d’une importance capitale, puisqu’il a permis de décortiquer le problème de la qualité de l’ingénieur dans les pays de l’Afrique centrale.
L’exode comme solution…
Alexandre Na’a Manga, ingénieur de génie rural, rappelle à cette occasion, que les conditions de travail découragent : « Généralement, on se trouve dans des cadres où les conditions ne sont pas les plus idoines. Et parfois cela entraine l’exode. » D’ailleurs ajoute-t-il, « après deux ans de travail au pays, les ingénieurs préfèrent aller à l’extérieur, parce qu’ils ont des meilleures conditions de travail et salariales » là-bas.
Surtout que, si l’on s’en tient aux propos de Régine Flore, « le jeune ingénieur nouvellement sorti de l’école, intègre difficilement une entreprise en Afrique centrale. Ceci aussi parce qu’il n’a pas d’expériences, que réclame la quasi-totalité des employeurs ».
Il faut encadrer l’importation des ingénieurs
Sur la question d’importation des ingénieurs, Alexandre rebondit : « Il y a des ingénieurs camerounais hautement compétents. Mais parfois dans les accords au niveau des financements venant de l’extérieur, les financiers qui viennent accompagner le Cameroun posent des conditions d’assistance technique de l’extérieur, alors que localement on peut trouver l’expertise requise, si on fait un bon casting. » Le regard est alors tourné vers les pouvoirs publics et ses partenaires internationaux pour la définition d’une loi encadrant cette démarche.
La rencontre a été unanimement appréciée par les participants qui demandent à ce qu’elle devienne habituelle certes, mais un refus catégorique de toujours verser dans la théorie, s’est fait entendre à Yaoundé. « Trop de théories ne nous servent à rien. Et en tant que femme, je souhaite qu’un réseau se créé pour qu’au sortir d’ici, on continue de partager nos expériences », lance la jeune ingénieur Régine Flore Madjouda. Un souhait, qui n’entre certainement pas dans les oreilles de sourd, puisque faisant partie des priorités de l’Unesco d’après Mme Akwa Odette Chi, programme Officer sciences naturelles de cette branche de l’ONU.
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Arnaud Kevin Ngano